Que lisez vous en ce moment ?... Sizone Tou !

Hop, j'ai terminé Voyage en Outre-Gauche de Lola Miesseroff chez Libertalia.



Lola Miesseroff avait 20 ans en 1968 et nous plonge dans les archipels de l'"Outre-Gauche" de l'époque: on évite les clichés et les images d’Épinal habituels sur Mai 68 pour s’intéresser à tous les groupes moins mis en avant, plus radicaux, dont la lutte a démarré bien avant et continué au-delà.
On y croise, entre autres, des anarchistes, l'Internationale situationniste, des étudiants, des ouvriers, toute sorte de libertaires, ça se moque des Mao et des Trotskistes...
Lola Miesseroff fait également le choix de faire parler le collectif et, surtout, de raconter collectivement: l'ensemble du bouquin est donc constitué d'extraits d’entretiens retranscrits de façon anonyme. On se retrouve du coup avec un texte foisonnant de vécus, d'infos, d'anecdotes, de regrets, d'espoirs ou de désillusions et c'est juste passionnant !
Très chouette surprise .

Sur le conseil de Mighty un peu plus haut. Réédition d'un ouvrage fait peu après le succès de Métronome. Les Historiens de garde revient sur la politisation de l'Histoire (pas vraiment une chose nouvelle) et comment certains s'affichent comme les gardiens d'un Roman National quitte à offrir des moments gênants d'incohérence (Jeanne d'Arc en symbole républicain, fallait le faire). Un livre assez salvateur, peut être un peu mal structuré par moment, mais rempli d'anecdotes montrant un travail de fond assez énorme (le nombre de sources en fin d'ouvrage )

Cool
Ma lecture remonte assez pour que je ne me souvienne pas spécialement des problèmes de structure mais, dans tous les cas, il faut avouer que ça fait plaisir de voir Bern, Deutsch, Ferrand et autres en prendre pour leur grade .
Un site existe en complément du bouquin et propose quelques articles pour ceux que le sujet intéresse: http://www.leshistoriensdegarde.fr/
William Blanc a publié pas mal d'autres choses chez Libertalia, en particulier des bouquins sur la fantasy ou les super-héros.

De mon côté, j'ai terminé deux trucs:


Le 9e numéro de la revue Ballast et, pour ma pomme, le premier que je lis.
Tenue par une trentaine de bénévoles, la revue vient en complément du site internet et cherche à "mettre à disposition un espace, aux allures de carrefour, où se croiseront, se rencontreront, se lieront et se disputeront les mouvements d’émancipation et de transformation sociale".
En gros, et d'après Wikipédia, un ancrage communiste libertaire ouvrant ses colonnes à toute la gauche anticapitaliste.
Parmi les articles qui m'ont le plus intéressés:
Une grève de femmes de chambre qui revient sur la grève des employées de l'hôtel Ibis Clichy-Batignolles, Animaux de laboratoire : voir la réalité en face qui rappelle quelques infos édifiantes concernant les tests sur les animaux et ses aberrations (expériences non mutualisées avec chaque labo ou chaque entreprises reproduisant les mêmes tests chacun de leur côté, "publish or perish" qui fait que des tas d'expériences inutiles sont effectuées juste histoire de publier un papier, etc...) ou encore, parmi d'autres, Drôle de temps, ami, texte très littéraire narrant le retour en Iran d'une exilée.




Le Guide Alan Moore de Laurent Queyssi et Nicolas Trespallé aux éditions ActuSF.
Un guide bien complet proposant une longue bio, un tour d’horizon de l'oeuvre du demiurgeek avec des textes revenant sur ses travaux les plus connus comme les plus confidentiels, voire même abandonnés, son intérêt pour la musique, l'anarchie, le cinéma, la magie, Northampton, la contre-culture...
Un tour complet doublé d'un portrait passionnant et qui, du coup, aborde également toute une part de l'histoire des comics (entre les brouilles avec DC et Stan Lee qui passe pour un blaireau, il y a de quoi se mettre sous la dent ).
Je ne sais pas si le fan de BD y apprendra forcément grand chose de nouveau, mais de mon côté j'ai pris grand plaisir à lire ce guide et ça m'a donné envie de découvrir tout un pan de l'oeuvre de Moore que je ne connaissais pas encore.

Ecotopia
Ernest Callenbach / 1975
Editions Rue de l'échiquier

Durant le confinement, les éditions Rue de l'échiquier ont offert Ecotopia en numérique, l'occasion pour moi de le lire enfin alors qu'il me faisait de l'œil depuis déjà quelques temps.
Roman écrit par Ernest Callenbach en 1975 et vendu à des millions d'exemplaires, sorti la même année chez nous et jamais réédité depuis, Ecotopia présente une société écologique radicale fondée suite à la sécession, vingt ans plus tôt, de la Californie, l'Oregon et l'Etat de Washington. A la reprise des liaisons diplomatiques avec les USA, le nouveau pays ouvre ses frontières à un journaliste américain, William Weston, qui décrira la société écotopienne à travers ses articles pour le Times-post.

Alors qu'en SF on est maintenant plus qu'habitués aux futurs dystopiques, voire post-apocalyptiques, les éditions Rue de l'échiquier nous proposent ici un roman utopique, présentant une société nouvelle, avec des idées, des propositions, sans pour autant négliger de présenter les aspects sombres du nouveau pays, Ecotopia étant encore jeune et en pleine transition... En tant que lecteur, il faut avouer que c'est très rafraîchissant et agréable à lire.

Cependant, la forme plombe totalement le roman: chaque chapitre est un article envoyé au Times-post dans lequel le journaliste aborde un nouveau thème, une structure très artificielle et froide rendant la lecture assez pénible et empêchant de se projeter véritablement dans la société écotopienne.
En alternance avec ses articles, on trouve des extraits du journal intime de William Weston, de quoi voir l'évolution du personnage qui, d'abord sceptique et cynique, laisse les idées écotopiennes infuser et va, petit à petit, se remettre en question et se déconstruire.
Malheureusement ces pages sont très ancrées dans leur époque, les 70's en pleine révolution sexuelle, et on y trouve énormément de romances et de scènes érotiques rapidement lourdes, d'autant plus que l'écriture des personnages féminins reste assez ratée malgré, j'imagine, toute la bonne volonté de l'auteur.

En bref, une déception, même si lire de l'Utopie en SF fait quand même pas mal de bien et rappelle que c'est aussi une littérature d'idées pouvant (et devant) se faire militante.




Utopies américaines, Expériences libertaires du XIXe siècle à nos jours
Ronald Creagh / 2009
Agone

Merci aux éditions Agone qui ont offert ce livre numérique durant le confinement.
Utopies américaines de Ronald Creagh est la version remise à jour et augmentée de son ouvrage de 1983, Laboratoires de l'Utopie. L'auteur y passe en revue diverses tentatives de communautés libertaires aux USA, revient sur leurs fondateurs, leurs idées, leurs fonctionnements, leur pérennité (ou pas)...
L'occasion de découvrir tout un pan méconnu de l'histoire des USA de 1800 à nos jours

[Du voyage du socialiste gallois Robert Owen en 1825 aux premières communautés fouriéristes, des mouvements contestataires des années 1960 à l’écologie et aux groupes punks ou lesbiens d’aujourd’hui, les États-Unis ont abrité nombre de communautés utopiques. Souvent installés comme jadis les moines dans des paysages magnifiques et isolés, mais aussi dans l’hôtel d’un village de l’ancienne Réserve de l’Ouest ou exploitant une mine de charbon sur leur territoire, ces groupes mettent à l’épreuve une volonté de vivre en dehors de la logique de la société dominante.
En revenant sur près de deux siècles d’expériences communautaires, ce livre lève non seulement le voile sur un phénomène méconnu et toujours actuel, mais le réinsère parmi les tentatives de lutte contre un système omnipotent, ouvrant une autre voie, originale et non exclusive, vers l’émancipation sociale.]

Tu deviens de plus en plus militant dans tes lectures, je me trompe ?

Ça se voit tant que ça ?

Je suis sûr que Mighty c'est Copycomic

Le Monde aveugle
Daniel F. Galouye / 1961
Denoël, coll. Présence du futur

Citation :

Ils vivent dans des CAVERNES plongées dans une totale OBSCURITÉ. Ils ne connaissent que la nuit, LA NUIT la plus absolue et pleine de DANGERS TERRIBLES. Ils sont aveugles, tous. Au fil des générations leur ouïe et leur odorat se sont développés comme ceux des animaux. Certains d'entre eux s'obstinent à découvrir un éventuel passage qui les mènerait à l'air libre. Mais le monde qui les attend au-dehors n'est-il pas plus TERRIBLE encore ?

C'est vrai ça ! Qu'est-ce qui peut être plus TERRIBLE encore que des CAVERNES OBSCURES pleines de DANGERS TERRIBLES, hein, dites-moi ?
C'est ce que va nous raconter Daniel F. Galouye, auteur de SF né en 1920 et décédé en 1976 après avoir écrit seulement 5 bouquins dont au moins deux sont devenus des petits classiques de la SF des 60's (Le monde aveugle, donc, et Simulacron 3).
Bon, j'imagine que les lecteurs qui ont découvert ça ado dans la vieille collection Présence du Futur ont du trouver ça bien cool: un roman de SF plein d'aventures avec un personnage principal utilisant les sons pour se déplacer, vivant dans ce qu'on devine rapidement être un monde post-apocalypse nucléaire dans lequel les survivants ont tout oublié et ont, au fil des générations, porté au rang de mythe / religion quelques concepts comme la Lumière, l'Obscurité ou les Radiations.
Aujourd'hui force est de constater que Le Monde Aveugle n'a plus grand chose de bien original tant ses thématiques sont devenues monnaie courante en SF. Reste toutefois un roman fun et intriguant, se lisant sans déplaisir, mais rien de plus.
Une critique toutefois à nuancer: lors de la ressortie du bouquin chez Folio SF en 2010, la traduction a été révisée et le roman est passé de 224 à 304 pages, de quoi laisser supposer que la vieille édition que j'ai eu sous les yeux proposait une version passablement sabrée.

Est-ce qu'il existe un site d'ailleurs où l'on peut facilement comparer les différentes éditions d'un même ouvrage?

Pour la SF, la base de données nooSFere est très complète et bien utile.
Pour le reste, j'avoue être plutôt preneur d'un tel site moi aussi.

Grosse déception. J'ai eu l'impression de lire un magasine de type CineFilm(s) ou autre. Un ouvrage qui se lit très rapidement, ne contient pas de réelle analyse et ne relate aucun conflit ou aucune difficulté majeure (genre la série n'essaie jamais de raccrocher certains wagons narratifs...) avec certes une jolie iconographie, mais qui se contente de dire "les acteurs sont géniaux, les scénaristes sont géniaux, les producteurs sont géniaux".
La dernière partie, en laquelle je mettais un peu d'espoir, est appelée "Mythologie" et je pensais réellement avoir une narration creusée du mythe. Je me suis retrouvé avec "dans Caprica on apprend que les cylons deviennent monothéistes".

Un livre complaisant.

Ceci a l'air mieux mais n'existe pas en FR




Sinon je lis (doucement) ça

Mon dieu, cette édition de La Conjuration des Imbéciles

Ça illustre bien le personnage principal

Certes ça illustre bien mais pour le marketing c'est chaud, jamais tu prends le livre si tu le croises

Moi pour pas cher j'ai chopé l'intégrale "prestige" de ça :



Du coup je relis pour la première fois depuis plus de 10 ans, quel zut de chef-d'oeuvre quand même

John Fitgerald Willis a écrit:

Certes ça illustre bien mais pour le marketing c'est chaud, jamais tu prends le livre si tu le croises

Moi pour pas cher j'ai chopé l'intégrale "prestige" de ça :



Du coup je relis pour la première fois depuis plus de 10 ans, quel zut de chef-d'oeuvre quand même

Ya que moi qui ne voit pas l'image ?
J'ai édité pour choper le lien de l'image et moi-même je ne parviens pas à la poster

Je la vois et je suis jaloux
Un jour je me ferai toute la collec Tezuka

La Vie mode d'emploi
Georges Perec (1978)

Cette claque !
Ce gigantesque roman "oulipien" de Perec est clairement ce que j'ai pu lire de mieux cette année avec le tout aussi gigantesque 2666 de Roberto Bolaño .

99 chapitres.
2.000 personnages.
Il n'en faut pas moins à Georges Perec pour nous décrire minutieusement un immeuble parisien, façade retirée et vue en coupe, passant de pièce en pièce et racontant par le détail et de façon exhaustive la décoration, les meubles, les occupants, leur histoire ou celle des objets...
En résulte un gigantesque puzzle - un thème qui a son importance dans le livre - bourré de pièces se rattachant petit à petit les unes aux autres tout en pouvant se contempler indépendamment. Le livre peut se lire dans n'importe quel ordre et, passant d'appartement bourgeois aux caves et escaliers, Perec s'essaye à tous les styles, du fantastique au fait-divers en passant par les recettes de cuisine ou les récits historiques...

Et comme Perec ne fait par les choses à moitié, la rédaction du bouquin suit également d'obscures règles et contraintes Oulipiennes. Il suffit de consulter la page Wikipédia consacrée au bouquin pour se rendre compte de la chose ! - avec une petite surprise dans les paires de la contrainte Livre/Tableau .
Pour la blague, l'agencement des chapitres:

Spoiler:

La Vie mode d'emploi est un "roman" ludique et fascinant, l'un de ceux qu'on a envie de recommencer à peine la dernière page refermée.

Ça a l'air génial hop dans le panier

Youn a écrit:

Sinon je lis (doucement) ça

Bah c'était bien sympa même si j'ai souvent eu l'impression que le récit stagnait. Lire les déboires apparents d'un personnage principal toxique dans un monde qui ne le comprend pas (et qu'il ne comprend pas), c'est super drôle au début mais ça peut vite devenir ronflant. Tout s'accélère dans le dernier quart et le final, désespéré et ironique, est parfait.

J'ai écouté Les aérostats d'Amélie Nothomb en audiobook



Nothomb c'est vraiment le talent qui énerve. C'est un écrivain qui a une écriture maitrisée tout en étant simple et accessible. Mais ses personnages me gonflent prodigieusement. Complètement surréalistes, ils sont constamment montrés comme des personnages supra intelligents à un point tel que cela frise le ridicule. Dans Les aérostats, l'un des personnages principaux n'a, à 15 ans, jamais lu de livre. Puis, en 2 nuits, il lit coup sur coup "Le rouge et le noir" puis "L'Iliade". Il indique avoir fait (tenté de faire) un débat philosophique avec sa mère à l'âge de 6 ans C'est exactement la même chose dans les autres livres de Nothomb que j'ai lus/écoutés et ça me sort complètement de ses histoires.

Sinon j'ai commencé Les piliers de la Terre.