La poison (Sacha Guitry - 1951)

J'ai regardé un peu le début. Le "générique" m'a fait marrer : Guitry y présente tous les intervenants du film, des acteurs aux techniciens. Si les acteurs (oh un De Funès !) sont super à l'aise devant la caméra, les techniciens sont crispés au possible et ne savent pas quoi faire de leur corps

Je me fait ça demain

la même
tu proposes déjà un flim quand même pour cette semaine ? histoire qu'on rattrape le retard?

Faut que je fasse une petite recherche je balance ça demain

Aussi jubilatoire que méchant .
Le film serait d'ailleurs impensable aujourd'hui tant il est, dans ce qu'il dit et dans comment il le dit, sujet à mauvaise interprétation.  
Et ça c'est en grande partie dû à la réputation fort méritée de Guitry, grand talent de plume autant qu'il fut grand misogyne devant l'éternel, qui n'aura eu de cesse d'écrire sur le sujet, les hommes, les femmes, les marivaudages sans fins. La Poison c'est limite un épisode de Black Mirror, un truc d'une noirceur absolue qui est sans arrêt contrebalancé par un humour et une légèreté qu'on finirait presque par croire déplacés...si ce n'était pas aussi jubilatoire . L'auteur (et le casting à sa disposition) excelle avant tout dans la mise en forme de dialogues qui font constamment mouche. Chaque réplique se boit comme du petit lait, entre humour noir et ironie mordante. Mais au-delà des mots, le film reste fondamentalement une critique acerbe d'un peu tout ce qu'il met en image, critique de la France d'après Guerre, critique des petits villages où tout le monde veut tout savoir sur tout le monde, où on laisse trainer une oreille, où on hisse le commérage et les ragots à hauteur de sport national. Critique de la justice enfin, sort d'imbroglio juridique où la morale a finalement peu sa place, et où, une fois encore, se sont finalement les enfants qui gardent encore en eux un semblant de bon sens.
Guitry est un réalisateur qui se tient assez au final. Sa mise en scène reste anecdotique (pas sûr qu'il se passionne franchement pour la technique) mais il est capable au détour de quelques scènes de nous laisser devant les yeux de petits coups d'éclats fort sympathiques (La séquence finale, sorte de montage alterné, est à ce titre brillante).

J'ai vu le film avant hier soir.

J'ai énormément aimé aussi. Le film m'a fait l'espace d'un instant à Ascenseur pour l'échafaud, avec ce court moment au cours duquel Braconnier se retrouve devant sa femme évanouie. Mais il se dirige vers quelque chose d'autre, moins subtil mais plus frontal et incisif. La Poison, c'est un film sur l'humanité mais pas ce qu'elle a de meilleur. Un village qui jase, épie, tue, se venge, emprisonne. Sacha Guitry aurait entassé quelques trucs pas glorieux les années avant : déceptions professionnelles, jours de cachot, accusation de collaborationnisme, maladie etc. En cela, le film est un écho au futur The Mist, qui a servi d'exutoire à Darabont qui en avait gros sur la patate également. Un film misanthrope.

Je ne crois pas qu'il ait un avis subtil sur la justice par contre. J'ai plus eu le sentiment de voir un avis de comptoir (élégant certes) pas très loin des "Taubira démission" récents. Quant à la scène avec les enfants, je la trouve ambigüe et je ne suis pas sûr que ce soit les garants du bon sens à travers les yeux du réalisateur.

Je te trouve assez dur avec sa mise en scène, très efficace je trouve et qui permet au spectateur de retenir son souffle plusieurs fois sans une once de dialogue, pourtant la spécialité du monsieur. Toute la séquence du retour de Braconnier chez lui à l'entrée des policiers dans la maison est parfaitement maitrisée. Et il se permet même de virer dans la comédie burlesque juste après sans que le changement de ton ne soit particulièrement choquant.

Louis de Funès jeune c'était pas encore le top niveau acting

Pour le délire de la guillotine en papier je n'y ai vu qu'un jeu d'enfant, l'essentiel étant simplement de montrer qu'ils avaient de leur côté parfaitement compris que tuer c'est une faute, un crime. Il faut replacer le film dans le contexte de l'époque, la peine de mort était alors encore bien en place.

Je ne l'ai pas pris comme ça, j'ai justement compris l'inverse. Que toutes nos fautes sont dans nos gènes, sont innées. Les gosses sont pire que les adultes.

Oui mais je suis un bisounours moi
Quelqu'un a le ouijapp de Guitry au pire? Qu'on lui demande?